Elles dénoncent les conditions de travail et le manque de suivi psychologique alors qu’elles étaient confrontées quotidiennement à du contenu extrêmement violent dans le cadre de leur travail.
Deux Américaines ont porté plainte jeudi contre TikTok et sa maison mère ByteDance. Elles les accusent d’aller à l’encontre des règles de sécurité au travail en ne les protégeant pas des dégâts psychologiques liés aux contenus violents qu’elles ont dû regarder chaque jour pour protéger les utilisateurs de la plateforme.
Des centaines de vidéos « extrêmement dérangeantes » regardées chaque semaine
« Nous voyions des morts et de la pornographique très explicite. Je voyais de jeunes enfants dénudés tous les jours, explique Ashley Velez, modératrice de mai à novembre 2021, dans une interview à NPR. Je voyais des gens se prendre une balle dans la tête et une autre vidéo d’un enfant qui se faisait battre m’a fait pleurer pendant deux heures. »
Les deux plaignantes Ashley Velez et Reece Young estiment que leur environnement de travail n’était pas adapté à ce type de tâches parce que TikTok ne leur fournissait pas le soutien psychologique adéquat contre l’anxiété, la dépression et le stress post-traumatique qui peuvent être causés par le visionnage de ces vidéos.
De plus, elles étaient toutes les deux contractuelles et leur paie dépendait de quotas de modération par jour. Elles devaient estimer si les vidéos allaient à l’encontre des règles en moins de 25 secondes et, selon la plainte, elles devaient regarder plusieurs vidéos en même temps pour atteindre ces quotas. En plus de leur heure de pause déjeuner, elles n’avaient droit qu’à deux pauses de 15 minutes sous peine de voir leur paie revue à la baisse. Elles ont également affirmé qu’elles avaient dû signer un accord de confidentialité qui leur interdisait de parler ce qu’elles avaient vu, même à leurs proches.
Les conditions de travail des modérateurs, un problème récurrent
Une porte-parole de TikTok a répondu à cette plainte que l’entreprise « cherchait à promouvoir un environnement de travail bienveillant pour les employés et contractuels ». TikTok a assuré que les modérateurs avaient accès à des services de soutien psychologique et émotionnel.
La question de la modération de contenu est un problème épineux pour les réseaux sociaux. À l’heure actuelle, l’intelligence artificielle ne peut pas être aussi efficace qu’un être humain ni faire preuve d’autant de nuance. C’est pour cette raison qu’il est nécessaire de faire appel à des employés dédiés. Cependant, vérifier une quantité infinie de vidéos — parfois violentes — en très peu de temps devient rapidement une tâche insupportable pour les modérateurs.
Les avocats qui représentent Ashley Velez et Reece Young ont aussi porté plainte contre Facebook pour les mêmes raisons il y a quelques années de la part de milliers de modérateurs. Suite à cette plainte, l’entreprise a conclu un accord de 52 millions de dollars en mai 2020.