Les eurodéputés ont adopté en milieu de semaine un texte non contraignant visant à relever l’âge légal d’utilisation des réseaux sociaux. Les « compagnons d’IA » sont également concernés.
L’Australie n’a pas tardé à faire des émules. Quelques jours après l’instauration d’une nouvelle loi interdisant aux mineurs de moins de 16 ans d’accéder aux réseaux sociaux, le Parlement européen plaide à son tour en faveur d’un texte similaire. Un texte adopté à une large majorité à Strasbourg mercredi dernier, mais dont l’instauration reste à discrétion des différents pays membres du fait de son caractère non contraignant.
Prévenir les “risques physiques et psychiques” encourus par les enfants et adolescents en ligne
Les contours de ce texte adopté avec enthousiasme sont clairs. Il vise à « fixer à 16 ans l’âge minimal harmonisé dans l’UE pour accéder aux réseaux sociaux, aux plateformes de partage de vidéos et aux compagnons d’IA, tout en permettant l’accès des 13-16 ans avec le consentement parental ». Le Parlement européen met donc dans le même panier les assistants d’intelligence artificielle, tels que ChatGPT, et d’autres modèles plus conversationnels encore, comme Replica.ai, très prisé des ados.
Porté par l’eurodéputée sociale-démocrate danoise Christel Schaldemose, le texte appelle à « une action urgente pour répondre aux enjeux éthiques et juridiques posés par les outils d’IA générative, y compris les deepfakes, les chatbots de compagnie, les agents d’IA et les applications de nudité alimentées par l’IA ». « Nous disons clairement aux plateformes : vos services ne sont pas conçus pour les enfants. Et l’expérience s’arrête là », commente l’eurodéputée à l’AFP (via Le Monde).
Les préconisations vont d’ailleurs encore plus loin et visent explicitement certaines pratiques de design d’interface (UX design) considérées comme trop addictives pour les mineur·es, comme le pull-to-refresh, permettant de rafraîchir le flux d’un réseau social et d’être à nouveau bombardé de contenu inédit. Les systèmes de récompenses, très en vogue sur certaines applications d’e-commerce ou sur TikTok, devraient aussi être proscrits, au risque d’un bannissement des sites sur le territoire européen.
En France, une proposition de loi similaire
Cette proposition européenne arrive quelques jours après que des députés macronistes ont déposé une proposition de loi visant à interdire l’accès aux réseaux sociaux aux moins de 15 ans, en France. Un texte rédigé par Laure Miller, autrice de l’enquête parlementaire sur les effets psychologiques de TikTok sur les mineur·es, et qui propose en sus un couvre-feu numérique pour les 15-18 ans de 22 h à 8 h du matin, et le bannissement des smartphones dans les lycées.
L’avenir nous dira sous quelle forme cette nouvelle barrière à l’accès au Web sera adoptée. Une chose est sûre : l’étau se resserre sur les grandes plateformes, accusées à la fois de rendre accros les plus jeunes (et pas que), mais aussi de laisser-faire en matière de modération du contenu susceptible de les blesser – cyberharcèlement, deepfakes et revenge porn en tête.
Des mesures qui, dans tous les cas, ne sont pas accueillies avec beaucoup d’enthousiasme par les défenseurs de la vie privée en ligne et par les plateformes elles-mêmes, qui considèrent souvent en faire suffisamment, notamment avec une variété d’outils de contrôle parental, comme celui que Discord vient de lancer.
Enfin, et c’est une évidence : qui dit interdiction d’accès aux réseaux sociaux aux plus jeunes et menaces d’amendes salées, dit également mise en place de mécanismes de vérification de l’âge des internautes. Au Royaume-Uni, qui a également renforcé son attirail législatif en ce sens en début d’année, chacun·e doit désormais faire vérifier sa carte d’identité avant de se connecter à ses réseaux sociaux. Le dernier clou dans le cercueil de l’anonymat en ligne ?