Le centre hospitalier rennais utilise une trentaine d’algorithmes d’intelligence artificielle et en développe aussi un pour aider au diagnostic par IRM du cancer de la prostate.
Réduire le temps de passage aux urgences sans dégrader la qualité des soins. Le centre hospitalier universitaire de Rennes utilise actuellement une trentaine d’algorithmes d’intelligence artificielle (IA), permettant notamment de gagner du temps pour la prise en charge des fractures, comme l’a rapporté l’AFP. Alors que six de ces algorithmes sont en routine clinique, le service des urgences – avec quelque 66 000 patients l’an dernier, dont environ un tiers pour la traumatologie – est l’un des tout premiers à avoir bénéficié de cette technologie.
« En 2019, on s’est rendu compte que ceux qui venaient pour des traumas de membres isolés, comme une entorse de cheville ou une fracture du poignet, restaient en moyenne 4h45 dans le service », a indiqué le Dr Ulysse Donval, spécialiste en traumatologie aux urgences. L’intégration du logiciel Boneview dans les systèmes d’imagerie du CHU a permis de réduire ce temps de passage sans dégrader la qualité des soins, a-t-il assuré.
Réduction du temps de prise en charge
Concrètement, les radios du membre concerné s’affichent sur l’écran, avec un cadre jaune sur la lésion que l’algorithme pense avoir détectée le cas échéant et la mention « oui » ou « non » à la rubrique « fracture », « luxation » et « épanchement ». Le logiciel interprète ainsi les radios en quelques minutes et signale aussi s’il a un doute, lié par exemple à une attelle parasitant l’image. Boneview est « extrêmement performant dans la détection de fractures mais aussi de l’absence de fractures », a déclaré le Dr Ulysse Donval.
Cette première interprétation permet à l’urgentiste de recevoir rapidement le patient, sans attendre une deuxième lecture par un médecin souvent débordé. Le patient peut ainsi rentrer chez lui s’il n’a pas de lésion grave. « Tous les patients qui sortent des urgences ont une lecture des radios » dans les heures qui suivent par un radiologue, a précisé le spécialiste en traumatologie, ajoutant qu’ils sont recontactés pour une prise en charge lorsqu’une anomalie a échappé à l’IA, ce qui est très rare. Avec ce logiciel, la durée moyenne de passage a diminué de 21% pour les patients sans fracture et de 27% pour ceux avec fracture, soit une réduction comprise entre 1h et 1h20.
Une IA presque aussi précise qu’un radiologue senior
Le CHU de Rennes ne fait pas qu’utiliser l’IA, il travaille aussi sur un algorithme d’aide au diagnostic par IRM du cancer de la prostate, qui est le plus répandu chez les hommes. En plus d’être « difficile à interpréter » pour les médecins non spécialisés, cette technique d’imagerie pour la prostate nécessite parfois la prise de centaines voire de milliers d’images, comme l’a expliqué le Dr Luc Beuzit. Raison pour laquelle il a entraîné une IA à en faire la lecture.
Pour cet algorithme, le CHU de Rennes collabore avec la startup française Incepto. Nourri avec une base de données de quelque 6 000 IRM de prostates, ce logiciel baptisé Paros est utilisé au quotidien en interne par les radiologues depuis novembre 2022. Il trace automatiquement les contours de la prostate, en calcule le volume et affiche en rouge une éventuelle lésion suspecte, à confirmer par une biopsie.
Presque aussi précis dans ses diagnostics qu’un radiologue senior et bien meilleur qu’un interne interprétant seul les images – selon les premières évaluations présentées à des journalistes la semaine dernière – Paros sera bientôt certifié et commercialisé dans le monde entier.