Selah Sue a accepté de revenir pour l’Eclaireur sur son dernier album, et l’importance de la scène.
En 2022, Selah Sue mettait fin à sept ans d’absence avec Persona, troisième album aventureux et personnel. La chanteuse se confiait notamment sur l’arrêt de la prise de médicaments pour soigner la dépression qui la ronge depuis des années. Aujourd’hui apaisée, l’interprète de Ragamuffin (2011) entame une série de concerts pour défendre son nouvel album et retrouver un public à qui elle a tant manqué pendant plusieurs années. Selah Sue sera à l’affiche du Fnac Live Paris, sur le parvis de l’Hôtel de Ville à Paris, ce vendredi 30 juin.
Un an après la sortie de Persona, quel regard portez-vous sur ce troisième album ?
J’en suis très fière. Évidemment, j’avais un peu d’appréhension avant sa sortie, après sept ans d’absence depuis mon deuxième album, Reason (2015). Beaucoup de choses se sont passées entre-temps : j’ai eu un bébé, il y a eu la crise du Covid… Mais finalement, quand j’y repense, j’étais plutôt en paix avec tout cela. J’ai pu travailler sur l’album avec mon compagnon, à la maison, et j’ai commencé à écrire sur de nouveaux morceaux quand l’inspiration est venue naturellement, sans la forcer.
Quand l’album est sorti, j’avais une sorte de détachement par rapport à sa réception critique. Je savais que j’avais enregistré l’album que je voulais, qui me ressemblait. Finalement, l’accueil a été très bon et j’en suis encore plus heureuse. Depuis la sortie de mon premier album (400 000 copies en France) et le succès de Ragamuffin, l’industrie musicale a beaucoup changé. En 2011, on vendait encore des disques, maintenant tout est digital. Je suis contente que, plus de dix ans plus tard, je sois encore capable de vivre de ma passion et de jouer dans de gros festivals.
L’enregistrement du troisième album semble avoir été radicalement différent de celui de Reason.
Bien sûr. Après le succès éclair du premier album, il fallait rapidement enregistrer la suite. J’ai été un peu contrainte d’écrire, alors que je n’avais pas forcément l’inspiration nécessaire et que je n’étais pas forcément en phase avec les producteurs de l’époque. Sur Persona, j’étais bien entourée, notamment par mon compagnon, qui produit et qui est un joueur de clavier exceptionnel. Mais j’aime beaucoup Reason, c’est un album important pour moi et il a vraiment contribué à ma construction en tant qu’artiste.
Pour ce troisième album, la Pandémie a joué un rôle déterminant. Tout le monde était à la maison, et je pouvais me permettre de mettre des mots sur mes insécurités. On a été bien aidés par une nourrice qui nous permettait de travailler toute la journée sur l’album. Bizarrement, ça a été une période très productive au niveau de la création.
Vous avez confié avoir très mal vécu votre tournée de l’été 2022. Comment abordez-vous cette nouvelle série de concerts ?
Oui, ça a été très compliqué. Je donnais énormément de concerts et ma santé mentale se détériorait. J’ai arrêté les médicaments, puis repris… Heureusement, j’étais entourée d’une équipe extraordinaire qui m’a aidée à aller au bout. Aujourd’hui, je vais beaucoup mieux, je ne suis pas à 100 %, mais je suis plus stable et c’est déjà une victoire. Cet été sera également chargé en concerts, mais je les aborde avec beaucoup plus de sérénité.
Vous jouez ce vendredi au Fnac Live Paris, que représente la scène pour vous ?
Un bon concert dépend de tellement de facteurs différents : le son, le public, les musiciens, l’humeur du jour… Quand toutes ces choses-là sont réunies, il y a presque quelque chose de magique qui se passe. J’aime aussi les petites erreurs, les couacs, ils rendent chaque concert unique. Je considère ces moments comme des expériences presque mystiques. Dans la foule, il n’y a plus de genres, de différences, tout le monde est relié par la même énergie et c’est très émouvant.
Quand j’étais au plus bas de ma dépression, les concerts m’ont beaucoup aidée. Cela me permettait, le temps de quelques heures, de vivre le moment à 100 %. C’était très thérapeutique.
Le festival invite cette année beaucoup de rappeurs comme Lujipeka, Lesram, Disiz… Vous semblez très attachée à ce genre, notamment avec les participations de Damso et de Mick Jenkins sur Persona.
J’écoute beaucoup de styles musicaux, mais c’est vrai que le rap a une place particulière. J’aime le rythme, les couleurs, les personnalités des rappeurs… J’ai eu la chance de travailler avec des artistes très talentueux comme Childish Gambino et Mick Jenkins. J’adore mélanger les influences hip-hop avec ma musique, j’ai longtemps grandi avec la musique des Fugees. Le rap m’a toujours accompagnée.
Quels sont vos derniers coups de cœur culturels ?
Je lis beaucoup de livres, je pense que le dernier qui m’a beaucoup marquée est L’Âme délivrée de Michael A. Singer. C’est un livre incroyable sur la spiritualité, un sujet que j’ai beaucoup étudié l’année dernière. J’avais besoin de me concentrer sur quelque chose de fort, et le livre apprend à “vivre le moment”, ce qui est très important pour moi aujourd’hui. Sinon, je ne regarde pas beaucoup de films, je préfère les séries. Je crois que Succession est la meilleure de tous les temps !
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