Il y a une semaine, le Sénat adoptait en première lecture une proposition controversée dans le nouveau projet de loi justice. On fait le tour de ce que cela change vraiment.
Une mesure qui fait débat et fortement critiquée par la gauche ainsi que l’Observatoire des libertés et du numérique. Mais le garde des sceaux, de son côté, tente de rassurer en évoquant une mesure entourée de « garanties importantes ».
Une disposition adoptée en première lecture
Il y a une semaine, le 7 juin dernier, le Sénat adoptait en première lecture une disposition très controversée du projet de loi justice. L’article 3 du texte porté par le garde des sceaux Eric Dupont-Moretti visait à apporter plusieurs modifications à la procédure pénale. Parmi ces modifications, deux ont notamment retenu l’attention de l’opposition et des observateurs: l’autorisation du déclenchement de la caméra et du micro des appareils connectés (ordinateur, téléphone) dans le cadre de certaines enquêtes, et la géolocalisation d’une personne en temps réel dans certaines infractions.
L’Observatoire des libertés et du numérique dénonce une « surenchère sécuritaire » qui permettrait de transformer tout objet connecté en « un mouchard ». De son côté, la gauche a tenté de faire supprimer un maximum de ces dispositions qu’elle jugeait problématique, sans succès. La droite, menée par son chef de file Bruno Retailleau au Sénat, a réussi à obtenir l’adoption d’un de ses amendements. Celui-ci permet de limiter la possibilité de recourir à la géolocalisation aux infractions punies d’au moins dix ans d’emprisonnement, contre cinq ans dans le texte initial.
Des techniques déjà utilisées mais sans un cadre précis
Ces dispositions de l’article 3 ont fait couler beaucoup d’encre dans la presse et au sein du Parlement. Du côté du gouvernement et des institutions judiciaires, on essaie depuis des semaines de convaincre que de telles mesures seront très encadrées et qu’elles ne sont, de plus, pas nouvelles. Par exemple, dans certaines enquêtes et afin de préparer une mise en examen, les enquêteurs peuvent déjà intercepter les données d’un téléphone à distance. Une pratique existante donc, mais peu encadrée puisque l’accord d’un juge d’instruction ou d’un Procureur de la République n’était pas nécessaire.
Cet article 3 apporte un véritable cadre légal dans ces pratiques dites d’espionnage en ajoutant l’approbation d’un juge dans la procédure avant d’être utilisées. De plus, intercepter les données d’un téléphone via sa caméra ou son micro serait réservé aux enquêtes pour terrorisme ou de délinquance et de criminalité organisées. L’avocat Alexandre Archambault expliquait à BFM TV à la fin du mois de mai que ces mesures nouvelles permettront d’éviter les contestations d’avocats, puisque la procédure aura auparavant été validée et inscrite légalement.
De son côté, Eric Dupont-Moretti tempère en disant que ces pratiques nécessitent de poser physiquement des balises sur les appareils, présentant alors des risques pour les enquêteurs, et que, de toute façon, la disposition est entourée de « garanties importantes ».