Décryptage

Les Youtubeurs et la musique : de McFly & Carlito à Joji, une tendance lourde

11 mai 2023
Par Mathieu M.
Les Youtubeurs et la musique : de McFly & Carlito à Joji, une tendance lourde

Deux ans après la sortie de Notre meilleur album, de McFly & Carlito, et le premier disque de Squeezie, la tendance des Youtubeurs-chanteurs ne désenfle pas. Joji, dont le nouvel album Smithereens sort en édition limitée à la mi-mai, incarne même le passage réussi à la musique d’anciens vidéastes. Tour d’horizon.

Notre Meilleur Album, le premier essai de McFly & Carlito

Notre Meilleur Album

Membres de renommée de la clique Golden Moustache, McFly & Carlito ont progressivement conquis le cœur des amateurs de vidéos humoristiques. Début 2021, c’est au delà de la plateforme YouTube que le duo se fait connaître : Emmanuel Macron les appelle à faire une chanson sur les gestes barrière pour sensibiliser les plus jeunes aux précautions à prendre en temps de Covid. Le succès est collossal.

Mais ce n’est pas la première fois que McFly & Carlito s’essaient à la musique. Bien au contraire, les chansons décalées font partie de leur ADN. 90 VS 2000 en featuring avec Squeezie avait déjà fait carton plein. Même son de cloche pour La Chanson des choses inutiles, où ils se sont payé le luxe d’inviter Julien Doré.

Alors, soyons fous : pourquoi ne pas se lancer dans l’enregistrement d’un album ? C’est désormais chose faite avec Notre Meilleur Album. Rien qu’en lisant le titre, on sait que le duo restera fidèle à son cheval de bataille : l’humour. Et cela se confirme avec les deux premiers extraits, Je ne suis pas chauve et TikTok Girl, qui ont fait une nouvelle fois exploser les compteurs. Pour le reste de l’album, nous avons encore affaire à des invités de choix comme Bigflo & Oli, Léopold et Pierre Niney. Nouveau défi relevé pour nos joyeux lurons, qui suivent les pas de Squeezie dans le monde du disque. 

Oxyz, un premier album pour Squeezie

squeezieUn an plus tôt, Squeezie reprenait un des meilleurs filons de sa chaîne YouTube : la parodie musicale, avec la série des Hits de l’été, qui venait s’ajouter à la longue liste de ses vidéos comique contenant des chansons délirantes et des clips référencés.

Se disant débutant, le célèbre gamer a voulu relever un challenge, en s’entourant de professionnels pour aborder la création d’un véritable album, accompagné d’une tournée. C’est ainsi qu’il s’est lancé dans un genre qu’il connaissait bien, le rap et plus globalement les musiques urbaines, et aboutit à la sortie d’Oxyz ce 25 septembre.

Un premier disque dans lequel Squeezie chante des thèmes que ses formats de vidéos YouTube, très montées et frénétiques, ne permettaient pas. D’autant plus que le garçon a souhaité d’emblée que ses chansons soient transposables sur scène. Une gageure pour le jeune homme, qui n’a que très peu de contacts réels avec son public, hormis quelques conventions.

Dans la continuité de ses premiers singles, comme Bye Bye ou Influenceurs, ce premier album répond aussi à une logique ambitieuse, avec des tubes facilement reconnaissables. Le vidéaste a pu collaborer avec un de ses artistes actuels préférés, Nemir, sur Guépard, ainsi qu’avec la star du moment, Gambi, dont vient de sortir le disque La Vie est belle.

Fidèle à son image de marque, le garçon a enfin travaillé le packaging d’Oxyz, élément important dans le storytelling de ce projet définitivement transversal et cohérent dans le parcours d’un Squeezie touche-à-tout, qui a réussi à se sortir de la case « Youtubeur gaming/streamer ». 

La musique, un sujet d’importance pour les Youtubeurs

En dehors des vidéos de gaming, façon Laink & Terracid, l’humour sur YouTube a longtemps été affaire de parodies. Outre les films, les séries ou les émissions, la musique actuelle a toujours été un terrain de jeu pour les comiques. On le remarque notamment avec le Palmashow, qui a multiplié les clips pastichant PNL, Julien Doré, Aya Nakamura.

Un format que l’on retrouve aussi chez McFly et Carlito, ou Natoo, et qui a définitivement fait du hip hop l’une des cibles préférées des humoristes du web 2.0. Mister V, cas à part, mène, lui, une double carrière, en étant à la fois un rappeur reconnu et un comique irrésistible.

Même chez ceux qui ont fait des sujets du quotidien leur marque de fabrique, comme Norman ou Cyprien, la musique a une part importante. A ses débuts, le premier a mis l’accent sur ses ambiances sonores en travaillant avec un groupe de rock, puis en se livrant à des parodies, souvent en collaboration avec Le Velcrou, son trio. Le second, lui, s’est fait remarquer en répondant au clash du rappeur des internets Cortex, proposant un freestyle rentré dans sa légende.

En concevant des jingles, en supervisant les bandes originales de leurs vidéos narratives, l’équipe de Joueur du Grenier a aussi montré l’importance de cette forme d’art pour mieux ponctuer l’humour. Le comique, souvent affaire de rythme, semble donner à tous ses vidéastes une prédisposition pour la musique, comme l’atteste le passage à l’acte de Squeezie !

Une génération YouTube dans la musique

En 2021, après une poignée de clips racés et une utilisation très réussie des réseaux sociaux, le duo Videoclub sortait son unique album, Euphories, témoignage disco-pop des amours adolescentes vécues par ses deux membres, Adèle Castillon et Matthieu Reynaud. Si quelques mois plus tard la séparation du couple créatif a empêché leur carrière commune de se prolonger, les deux jeunes artistes n’ont pas arrêté la musique. Adèle Castillon, qui a dévoilé ses premiers titres solo Rêve et Impala, et enchaîné les premières parties pour Angèle, a d’abord brillé sur YouTube, à son adolescence. Des vlogs à Amour plastique, passant de l’humour à la musique, elle a gardé son sens de la communication intact, comme l’atteste sa manière d’utiliser la vidéo pour documenter son processus musical.

Dans le monde, cette transition de YouTube au studio et à la scène s’incarne parfaitement avec Joji. Il y a une dizaine d’années, George Miller, jeune australo-japonais, a multiplié les vidéos courtes, particulièrement trollesques, en incarnant des personnages déjantés comme Filthy Frank et Pink Guy. Faisant l’objet d’un véritable culte sur l’Internet anglo-saxon des années 2010, notamment avec la création du meme Harlem Shake le garçon ne peut assumer longtemps son statut d’icône geek subversive. Régulièrement démonétisé et gagné par des problèmes de santé, le youtubeur se recentre sur sa passion de toujours : la musique. Exit les costumes cheap et les imitations, place à l’artiste. Le projet Joji prend alors forme, avec un premier album R&B et sérieux, Ballads 1. Il a fait son come-back en 2022 avec le disque Smithereens, disponible ce mois-ci en vinyle collector. Son clip Glimpse of Us, sorte de court métrage sur le lumpenprolétariat tourné avec des caméras amateur, ou celui de Die For You, montage travaillé de différentes séquences, rappelle que le chanteur maîtrise toujours autant les codes de la plateforme qui l’a fait connaître !

Joji - 1

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Article rédigé par
Mathieu M.
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